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L’article 43 du Code criminel du Canada énonce ce qui suit :

Tout instituteur, père ou mère, ou toute personne qui remplace le père ou la mère, est fondé à employer la force pour corriger un élève ou un enfant, selon le cas, confié à ses soins, pourvu que la force ne dépasse pas la mesure raisonnable dans les circonstances.

L’article 43 offre une défense aux parents ou leur substitut et les enseignants qui sont accusés d’agresser physiquement un enfant dont ils sont responsables. L’article prend pour acquis que d’avoir recours à la force pour « corriger » la conduite d’un enfant peut être « raisonnable ».

La fondation Canadian Foundation for Children, Youth and the Law a reçu une subvention du Programme de contestation judiciaire pour mettre à l’épreuve l’article 43 du Code criminel en se fondant sur un argument constitutionnel que l’article portait attente aux droits égalitaires de l’enfant en vertu de l’article 15 de la Charte canadienne des droits et des libertés. Ailsa Watkinson avait fait une demande initiale auprès du Programme pour financer l’ensemble de la contestation judiciaire avec la Canadian Foundation for Children, Youth and the Law.

Cheryl Milne, avocate employée avec la clinique au moment de la contestation et Paul Schabas de Blake, Cassels & Graydon étaient les avocats plaideurs dans la cause. Paul Schabas avait offert ses services sur une base pro bono.

En 1998, la Canadian Foundation for Children, Youth and the Law a débuté une instance à la Cour de l’Ontario (Division générale), maintenant la Cour supérieure de l’Ontario, en tant que partie à un litige d’intérêt public, pour obtenir une déclaration que l’article 43 du Code criminel était inconstitutionnel. Le fondement principal de la contestation reposait sur l’argument juridique que la défense porte atteinte au droit de l’enfant à l’égalité devant la loi et l’égalité de bénéfice et protection égale de la loi en vertu de l’article 15 de la Charte et le droit de l’enfant à la sécurité en vertu de l’article 7 de la Charte. La contestation s’appuyait également sur les obligations du Canada en vertu de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant.

Les témoins experts qui ont déposé des déclarations sous serment comprennent les personnes suivantes :

  • Dr. Murray Straus, un sociologue de l’Université du New Hampshire et un chercheur de pointe sur le châtiment corporel;
  • Dr. Joan Durrant, une psychologue de l’Université du Manitoba;
  • Dr. Jim Garbarino, un grand spécialiste sur la maltraitance des enfants et la violence à l’égard des jeunes à l’Université Cornell;
  • Dr. George Holden, un psychologue de l’Université du Texas et un expert sur le développement de l’enfant;
  • Peter Newell, un défenseur de renommée internationale sur la question du châtiment corporel et sur la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant;
  • Prof. A. Wayne MacKay, un professeur de droit à l’école de droit Dalhousie et un expert en droit de l’éducation et en droit constitutionnel;
  • Prof. Edward Morgan, un expert en droit international à l’école de droit de l’Université de Toronto;
  • Prof. Tammy Landau, un professeur à l’Université polytechnique de Ryerson qui a dirigé une recherche sur comment la police réagissait aux incidents liés au châtiment corporel des enfants dans certaines communautés canadiennes. Une coalition d’organismes a déposé une demande d’accréditation d’intervenants pour appuyer notre demande devant la Cour supérieure de l’Ontario. Ce groupe comprend les organismes suivants :
  • L’Ontario Association of Children’s Aid Societies, La Défense des enfants International
  • La ligue pour le bien-être de l’enfance au Canada, Le National Youth in Care Network
  • La Society for Children and Youth B.C.
  • Le Conseil canadien des défenseurs des enfants et des jeunes
  • Le Repeal 43 Committee
  • L’Association des infirmières et des infirmiers du Canada et l’Association canadienne des travailleurs sociaux.

La qualité d’intervenant a été accordé seulement à l’Ontario Association of Children’s Aid Societies.  L’association a été représentée sur une base pro bono par Greg Richards du cabinet juridique Weir Foulds LLP.

Le Procureur général du Canada représenté par le ministère de la Justice s’est opposé à cette demande. L’Association canadienne des enseignants et des enseignantes a obtenu la qualité d’intervenant en tant que partie pour déposer de la preuve sur les répercussions de l’article 43 pour les enseignants. Ils se sont opposés à l’abrogation de l’article 43 et leur position demeure que les enseignants ne devraient pas avoir recours au châtiment corporel à l’égard des élèves. Une coalition d’organismes qui se nomme la Coalition for Family Autonomy qui comprend les groupes Focus on the Family, REAL Women of Canada, Canadian Family Action Coalition et Home School Legal Defence Association of Canada ont reçu l’autorisation d’agir comme intervenants pour présenter une argumentation en faveur de l’article.

En juillet 2000, Le juge McCombs a statué que l’article 43 était constitutionnel et a rejeté la demande. L’appel de la décision a été entendu par la Cour d’appel de l’Ontario en septembre 2001. Le 15 janvier 2002, la Cour a rejeté l’appel et a maintenu la constitutionalité de l’article en énonçant que [TRADUCTION] « de permettre aux parents et aux enseignants d’avoir recours à une force correction de façon stricte et limitée sans répercussions pénales afin qu’ils puissent s’acquitter de leurs responsabilités importantes d’élever et d’entourer de soins les enfants sans le préjudice que de telles répercussions pourraient avoir sur eux, leurs tâches et les familles concernées »

La Fondation a reçu l’autorisation d’interjeter appel à la Cour suprême du Canada. Les intervenants des autres instances ont continué de participer avec en plus la Ligue pour le bien-être de l’enfance du Canada, représentée par Michael Barrick et Christopher Whalen de McCarthy Tetrault LLP ainsi que Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse en son nom et en celui du Canadian Counsel of Provincial Child Advocates.

L’appel a été entendu le 6 juin 2004 et la Cour suprême a rendu sa décision le 30 janvier 2005. Les juges majoritaires ont déclaré l’article constitutionnel mais ont limité son interprétation à une l’utilisation d’une force de nature négligeable. En particulier, les juges majoritaires ont statué que les gestes suivants ne seraient pas perçus comme raisonnables :

  • La force qui cause un préjudice ou peut causer une lésion corporelle;
  • La force employée parce qu’une personne est fâchée, frustrée ou parce qu’elle a perdu son tempérament ou parce qu’elle a une « personnalité agressive »;
  • La force employée sur un enfant de moins de 2 ans ou sur un adolescent;
  • L’emploi d’un objet pour frapper un enfant;
  • Frapper un enfant sur la tête;
  • La conduite dégradante, inhumaine ou préjudiciable;
  • L’emploi de la force sur des enfants ayant un handicap qui rend leur apprentissage plus difficile;
  • Le recours au châtiment corporel par un enseignant.

La Cour était divisée dans sa décision avec les juges minoritaires qui étaient de l’avis que l’article ne violait pas la Charte. Le juge Binnie aurait statué que l’article portait atteinte à l’article 15 de la Charte mais qu’il était justifié en vertu de l’article 1 à l’égard des parents mais non des enseignants. La juge Arbour était d’avis que l’article violait les droits des enfants en vertu de l’article 7 de la Charte, alors que le juge Deschamps a statué que l’article violait l’article 15. Les juges Arbour et Deschamps étaient tous les deux de l’avis que les violations n’étaient pas justifiées en vertu de l’article premier.

 

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